Les conditions d'exercice des professions des soignants (infirmières et aides-soignantes principalement) en maison de retraite sont difficiles, car à la pénibilité physique dues à la manipulation des personnes âgées pour leur hygiène et leur confort, la manutention du linge, la réfection des lits..., s'ajoutent les traumatismes psychologiques que vivent les soignants...
Les conditions d'exercice des professions des soignants (infirmières et aides-soignantes principalement) en maison de retraite sont difficiles, car à la pénibilité physique dues à la manipulation des personnes âgées pour leur hygiène et leur confort, la manutention du linge, la réfection des lits..., s'ajoutent les traumatismes psychologiques que vivent les soignants travaillant auprès de personnes en fin de vie, aux agressions verbales ou physiques de personnes séniles souffrant de troubles mentaux ou des membres de leur famille...
Les risques chimiques lors de l'utilisation des produits désinfectants ou détergents, le risque biologique infectieux et parasitaire lors du contact avec le linge souillé ou avec des résidents atteints de pathologies présentent d'autres dangers pour les salariés des maisons de retraite.
Les soignants en maison de retraite ont, en fait, à gérer un rapport émotionnel aux autres qui est souvent beaucoup plus sollicitant que le travail lui-même.
Aussi, le risque d'épuisement professionnel chez les personnels soignants en maison de retraite, lié à la pression affective et émotionnelle importante d'une confrontation permanente à la souffrance, à la déchéance physique et mentale et à la mort, est sans doute le risque pour lequel la prévention est à la fois la plus importante et la plus difficile à mettre en œuvre : il est indispensable de développer un travail d'équipe ainsi que la formation psychologique et l'accompagnement du personnel en maison de retraite, pour éviter que les soignants soient isolés et insuffisamment formés à la prise en charge des personnes âgées, qu'elles soient valides ou surtout dépendantes.
Bien entendu, il est nécessaire aussi d'améliorer les conditions et l'organisation du travail, par des aides à la manutention, des matériels ergonomiques, des équipements individuels de protection adaptés, la formation aux gestes et postures et à l'hygiène...
Au delà de la réduction des accidents du travail et des maladies professionnelles du personnel des maisons de retraite, les mesures de prévention des risques permettent de diminuer le taux d'absentéisme, de fidéliser le personnel, de limiter le turn-over, de maintenir la qualité exigée, pour des métiers qui recherchent de plus en plus de candidats, au fur et à mesure que l'augmentation de l'espérance de la durée de vie de la population multiplie les besoins en structures et institutions gériatriques pour accueillir les personnes âgées.
Les principaux risques professionnels en maison de retraite
Les maisons de retraite sont des établissements sociaux et médico-sociaux, publics ou privés, de plus en plus médicalisés, hébergeant des personnes âgées dépendantes ou accueillant des personnes âgées valides.
De façon plus ou moins marquée, selon l'âge et la dépendance des résidents, on trouve un environnement de la personne âgée qui, par rapport aux risques qu'il engendre, a les caractéristiques suivantes :
- La proximité de la fin de vie, qui se traduit par une confrontation à des décès multiples et successifs,
- La grande fréquence des maladies des résidents, qui se traduit par une confrontation constante à la souffrance et aux germes pathogènes, mais aussi à une faible technicité des soins, car il ne s'agit pas d'un hôpital,
- La dépendance physique, qui nécessite l'aide au lever et au coucher, à l'habillage, à la toilette, à la prise des repas... avec de nombreuses difficultés locomotrices, visuelles, auditives à gérer.
- La déchéance mentale, qui se traduit par une confrontation à de nombreux troubles du comportement, du langage, de la mémoire, de l'attention, du jugement... jusqu'à la démence sénile.
- Le contact avec les familles, avec des réactions psychologiques d'angoisse et de culpabilité de leurs membres et des attitudes de rivalité inconsciente de ceux-ci vis-à-vis des soins prodigués.
Cet environnement conduit, pour le personnel soignant, à l'exposition à des risques physiques, biologiques, chimiques et surtout psychologiques.
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Les risques physiques du personnel soignant des maisons de retraite
Aider et soutenir les personnes dans les actes de la vie quotidienne en tenant compte de leurs besoins et de leur degré d'autonomie, entraine des actions physiques qui sollicitent beaucoup l'appareil musculo-squelettique.
Les manipulations liées au lever ou au coucher des résidents, à l'habillage ou déshabillage, à la toilette sont d'autant plus difficiles et nombreuses à effectuer que les résidents ne sont pas en mesure d'aider et pèsent lourds.
Il en résulte une combinaison d'efforts pouvant être importants et des mauvaises postures, lors des soins corporels et de la réfection des lits notamment, et une accumulation de gestes mineurs qui entrainent le plus souvent des postures de dos penché ou en torsion.
Ces manipulations sont responsables de nombreux traumatismes rachidiens, lombalgies et affections péri-articulaires des membres supérieurs particulièrement.
La station debout permanente et les nombreux déplacements dans la maison de retraite, les piétinements génèrent aussi fréquemment des pathologies veineuses.
Les risques de chutes de plain-pied sur des sols glissants aux abords des lavabos, douches et WC, sont la source de lésions cutanées et/ou ostéo-articulaires (foulure, entorse, plaies, contusions, voire fracture). -
Les risques biologiques du personnel soignant des maisons de retraite
La transmission des agents infectieux véhiculés par le sang ou les autres liquides biologiques lors des soins (sang) ou de nursing (selles et urine de la toilette intime ...), les retours de l'hôpital du fait des maladies nosocomiales, les agressions physiques de résidents agités (morsures, griffures) sont des situations fréquentes à risque infectieux.
La contamination peut se faire par contact direct avec une personne malade par voie respiratoire ou cutanée (notamment affections rhino-pharyngées et bronchiques, grippe, gastroentérite, hépatites, staphylococcie etc....).
Les infections peuvent se propager à travers des aiguilles de seringues, ou par contact avec du linge souillé.
Tout contact avec du sang ou un liquide biologique sur une peau lésée par une effraction cutanée (piqûre ou coupure) ou une projection sur une muqueuse (œil, bouche) est potentiellement contaminant.
Les affections parasitaires (poux, gale) peuvent survenir lors de la réception et la désinfection d'une personne âgée à l'hygiène négligée.
Les risques biologiques sont majorés par le fait que le personnel de maison de retraite hésite à transformer la relation avec le résident en relation médicale et minimise le risque infectieux et ne prend pas tous les moyens de protection nécessaires (gants, masques), perçus comme créant des barrières entre les soignants et les résidents. -
Les risques chimiques du personnel soignant des maisons de retraite
Des lésions eczématiformes (ou bien dermatoses irritatives) aux mains sont dues à l'usage répété de désinfectants et détergents.
Des effets cutanés, irritation et sensibilisation, ainsi que les troubles respiratoires sont produits par le glutaraldéhyde, utilisé pour la stérilisation à froid des surfaces et du matériel médical. -
Les risques psychologiques du personnel soignant des maisons de retraite
Par rapport aux soins infirmiers en général, les soins en maison de retraite présentent des caractéristiques de stress supplémentaires, cumulant des effets d'usure professionnelle que l'on retrouve à la fois dans les services de soins palliatifs et psychiatriques :
- La proximité et l'inéluctabilité de la mort génère sentiment d'impuissance, d'échec et de culpabilité,
- La plupart des soignants souffrent de la confrontation avec des personnes souvent marquée par l'échec relationnel,
- Les infirmières ont une vision de l'exercice de leur activité fréquemment source de frustration et d'insatisfaction sur le plan de la technicité des soins,
- Les aides-soignantes ont une vision de leur rôle peu enrichissant, souvent restreinte à la satisfaction des besoins corporels, leur l'activité étant souvent perçue comme une succession de tâches à accomplir à la chaîne.
Aussi, la charge psychologique, la confrontation permanente sans issue (ce qui n'est pas le cas des services de secours ou hospitaliers qui sauvent et guérissent) avec le handicap, la mort, la démence, génère un risque mental dominant dans le secteur des soins en maison de retraite.
A cela s'ajoute des facteurs aggravants, comme le travail de nuit, les horaires décalés ou le week-end et les jours fériés, le contact avec les proches du patient pouvant entraîner conflit et agression, le manque de maturité professionnelle de jeunes femmes fraîchement diplômées.
Les relations avec le résident sont selon les cas, faciles et attachantes, ou difficiles avec des personnes méfiantes, autoritaires, exigeantes, agressives ou bien désorientées. Des relations conflictuelles peuvent parfois survenir avec certaines familles. Il faut alors supporter le manque de considération ou du résident ou de ses proches.
De plus, il faut compter avec la souffrance mentale liée aux difficultés à concilier les exigences déontologiques (apporter la meilleure prise en charge possible), et les exigences administratives (toujours plus vite, avec moins de moyens).
Enfin, l'agression physique violente (coups, projections d'objets, morsures, griffures) ou verbale (cris, injures..) se rencontre avec les personnes atteintes de démence sénile.
L'excès de stress peut paradoxalement engendrer parfois chez le personnel de maison de retraite des formes de négligence voire de maltraitance, car il se sent souvent incapable d'entrer en relation avec certains résidents et est alors coupables de comportements d'abandon ou de réactions à connotation agressive (impatience, énervement).
La fatigue psychologique qui en résulte, pouvant parfois aller jusqu'à l'épuisement nerveux et la dépression, est la conséquence de l'excès de tous ces facteurs stressants qui se cumulent à la longue, entraînant de nombreuses conséquences psychosomatiques : perturbations du sommeil, crises d'angoisse, troubles gastro-intestinaux (ulcères...), troubles du comportement dont des conduites addictives (alcoolisme, drogues) et alimentaires (boulimie), maladies cardio-vasculaires, troubles hormonaux.
Les mesures de prévention des risques professionnels en maison de retraite
Réaliser des soins quotidiens en utilisant les moyens de protection, outils de manutention et techniques appropriées, disposer de connaissances spécifiques sur le rôle des soignants en gérontologie, sur les meilleures pratiques développées par d'autres établissements, développer le travail d'équipe en valorisant le professionnalisme, adopter des stratégies de coping pour faire face aux plaintes, exigences, agressions, décès des résidents... font partie des mesures de prévention des risques du personnel des maisons de retraite.
Tout d'abord, le recrutement doit s'attacher à sélectionner des personnes au solide équilibre psychologique, allié à une grande résistance physique et nerveuse et à des qualités d'écoute, de patience et des aptitudes au travail en équipe.
Les personnels soignants sont insuffisamment formés par les écoles à la prise en charge des personnes âgées, surtout celles atteintes de la maladie d'Alzheimer, sur de nombreux aspects comme l'apprentissage de gestes adaptés, l'aptitude à la communication non verbale... et la formation continue des soignants des maisons de retraite doit être suffisamment variée et longue pour pallier cette déficience : dans ce domaine, l'apprentissage de terrain est toujours aléatoire et incomplet.
Enfin, il faut veiller à respecter une densité du personnel satisfaisante, sinon cela représente une difficulté majeure pour le personnel soignant dont le rôle valorisant inclut la dimension d'accompagnement en fin de vie.
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Les mesures de prévention techniques
Il convient d'agir en priorité sur la conception ergonomique des locaux et des équipements de travail, le respect des règles d'hygiène, puis sur les équipements de protection individuelle adaptés et la vaccination.
- La protection collective
Les parties des locaux potentiellement glissantes (salle de bain, WC) doivent aménagées en revêtements de sols antidérapants (carrelage anti-déparant).
Les locaux bien éclairés ne doivent pas comporter d'espace de circulation encombré, notamment les entrées, escaliers, issues de secours qui doivent être libres de tout obstacle, il convient de privilégier les surfaces libres dans l'agencement du mobilier, de disposer de douches assez vastes, munies de barres d'appui et de siège...
Les équipements mis à disposition doivent comporter des aides techniques comme des lits médicalisés à hauteur variable, des lève-malade, des fauteuils roulants ergonomiques, des chariots de service ... afin d'éviter les manutentions inutiles.
- Le respect des précautions générales d'hygiène
Des précautions d'hygiène doivent être appliquées vis-à-vis de tous les résidents, quel que soit leur statut infectieux. Le lavage des mains, le nettoyage et la désinfection des surfaces souillées, le transport du linge et des matériels dans un emballage fermé étanche, la gestion des déchets souillés, doivent faire l'objet de procédures rigoureuses.
Les points de lavage des mains avec des solutions hydro-alcooliques, doivent être facilement accessibles, nombreux, complets et bien entretenus.
- La protection individuelle
Les équipements de protection individuels sont indispensables au personnel des maisons de retraite pour les soins et les toilettes : vêtements de travail (blouse, combinaison, coiffe, tablier ...), gants de protection en vinyle, chaussures ou mocassins avec des semelles anti-dérapantes.
- La vaccination
Les vaccinations obligatoires (tétanos, diphtérie, poliomyélite, hépatite B, BCG) doivent être complétées par des vaccinations recommandées dans certaines situations plus risquées (vaccination contre l'hépatite A et la typhoïde).
- La formation
• Formation gestes et postures adaptée aux personnes à mobilité réduite, à la manutention des malades (techniques de relevage, aide à l'habillage, au coucher et à la toilette...)
• Formation incendie (exercices d'évacuation)
• Formation à la manipulation de produits souillés, de déchets médicaux
• Formation à l'application des précautions standard d'hygiène
• Formation à la procédure de déclaration d'accident avec exposition au sang (A.E.S.) -
Les mesures de prévention psychologiques
Une formation continue, adaptée aux aspects psychologiques du métier de soignant en maison de retraite est nécessaire.
Elle permet de comprendre les troubles du comportement et de réagir au mieux. Elle permet aussi de savoir conserver ses "distances" pour se préserver des conséquences d'un attachement trop grand, de se familiariser avec les méthodes d'accompagnement des personnes âgées et de leur famille, de disposer de techniques de dialogue et de communication qui contribuent à désamorcer les risques de violence.
La formation à la gestion des conflits et du stress destinée au personnel en maison de retraite (techniques de « coping », afin d'obtenir un meilleur contrôle émotionnel) est dispensée par des cabinets de conseil spécialisés : les stratégies de coping sont efficaces parce que l'individu finit par s'habituer par apprentissage à la même situation stressante et ses manifestations d'anxiété diminuent.
Le soutien psychologique doit être prévu par une procédure d'accompagnement et de prise en charge du stress afin d'en limiter les conséquences psychologiques et somatiques : prévoir des réunions de concertation régulières pour exprimer ses problèmes professionnels à des collègues et avoir des échanges avec eux sur la façon de surmonter les difficultés, prévoir une structure d'aide psychologique et d'écoute pour le personnel ainsi que des groupes de parole avec l'encadrement pour la gestion du stress. La notion de soutien social - aide apportée par les collègues et la hiérarchie dans la réalisation des tâches et degré d'intégration dans le groupe et de cohésion sociale - est en effet un modérateur puissant des effets du stress au travail.
Juin 2011
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