Le travail est isolé lorsque le travailleur effectue seul des travaux ou une tache en étant hors de portée de vue ou de voix pendant un certain temps, et ainsi, lorsqu’il ne dispose pas de possibilité de recours en cas d’aléas, d’accident ou de malaise.
Le travail isolé aggrave la dangerosité de l’activité. La durée d’isolement majore le risque.
Le travail est isolé lorsque le travailleur effectue seul des travaux ou une tache en étant hors de portée de vue ou de voix pendant un certain temps, et ainsi, lorsqu’il ne dispose pas de possibilité de recours en cas d’aléas, d’accident ou de malaise.
La durée d’isolement majore évidemment le risque : dans la plupart des cas, il s’agit de plus d’une heure, mais cela peut être moins pour des travaux particulièrement exposés à des dangers.
Le travail isolé aggrave la dangerosité de l’activité, car, par exemple, des réactions inadaptées à une situation imprévue peuvent apparaître du seul fait de ne pouvoir se faire aider ou consulter ses collègues ou supérieurs hiérarchiques.
Les postes de travail concernés sont très nombreux et variés : personnels d'entretien, de livraison, de dépannage ou de soins à domicile, représentants, petits commerçants, travailleurs agricoles et forestiers, transporteurs routiers, gardiens... et 10% des salariés seraient concernés au moins de temps en temps.
La prévention commence par une organisation du travail qui permet de réduire ou d’éliminer les situations de travail isolé, puis mettre en œuvre des moyens d'alerte et prévoir les dispositions pour le secours.
La mise à disposition des travailleurs d’un DATI (Dispositif d’Alarme pour Travailleurs Isolés) qui comporte un émetteur et un récepteur, permet la détection de l’état physique de l’employé et sa localisation.
Par ailleurs, il existe des travaux pour lesquels le Code du travail impose qu’ils doivent faire l’objet d’une surveillance et qui ne peuvent donc pas être réalisées par un travailleur isolé (par exemple, manœuvres d’appareils de levage et d’engins de chantier, travaux dans les locaux électriques, dans les puits, cuves, galeries ...).
Les risques spécifiques au travailleur isolé
Le travail isolé peut être dangereux intrinsèquement soit pour des raisons médicales ou psychologiques propres au travailleur lui-même, soit dans des contextes de violence externe.
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Les risques de nature médicale
Certaines personnes présentent des pathologies entrainant des symptômes d’apparition brusque et pouvant handicaper au moins temporairement la poursuite de la mission, la rendre dangereuse voire impossible : crises d’angoisse, d’épilepsie, cardiaques, diabétiques, vertigineuses ... -
Les risques de nature psychologique
Les réactions à des situations d’isolement sont plus ou moins bien supportées par les travailleurs, car leurs appréciations et leurs perceptions individuelles de leur isolement conditionnent largement leurs attitudes.
Si l’isolement physique est définissable géographiquement, ce qui va être prépondérant dans de nombreux cas, c’est l’isolement psychique ressenti par le travailleur, soumis à une variabilité personnelle importante.
En effet, certaines personnes éprouvent un sentiment d’abandon, de frustration d’avoir à travailler seul (surtout lorsque ce poste leur a été imposé), alors que d’autres peuvent, au contraire, y trouver un épanouissement, avec de la variété dans les différentes interventions et contacts, loin pour eux du travail ennuyeux et plein de contraintes de l’usine ou du bureau.
Les caractéristiques mentales jouent donc un rôle important : en particulier, face à une situation imprévue, le travailleur isolé peut être confronté à l’anxiété d’avoir à décider seul, ce qui est accidentogéne, du fait, concomitamment ou pas :
- D’une réaction inadaptée due au stress amplifié par l’absence d’aide et de soutien de ses collègues et de sa hiérarchie.
- D’un manque de formation, d’expérience ou de moyens sur place pour résoudre le problème efficacement et sans danger, qui se traduit par un « bricolage » hasardeux, entrainant des risques pour lui-même (mécaniques, électriques...), mais aussi pour autrui, dans l’instant ou ultérieurement.
L’isolement peut aussi entrainer des comportements risqués, non prohibés ou tempérés par le groupe de travail : vitesse excessive, consommation d’alcool, non port d’un équipement de protection, utilisation d’outils inappropriés, travaux excédant les capacités physiques...
Bien entendu, l’isolement aggrave non seulement la probabilité d’accident mais aussi sa gravité, c'est-à-dire majore le niveau de criticité de l’activité professionnelle sur ses deux composantes. En effet, les conséquences de l’accident sont aggravées parce que les dommages causés par l’accident empirent par manque de secours immédiat et/ou adapté. -
Les risques liés à la violence externe
La violence externe (par un client ou un tiers à l’entreprise) peut prendre plusieurs formes : agressions verbales, physiques ou psychologiques contre une personne dans l’exercice de ses fonctions. Le travail isolé contribue à favoriser les agressions (souvent pas de témoin et /ou de possible recours à autrui), d’autant plus que les secteurs professionnels qui augmentent le risque de violence externe sont très souvent ceux des travailleurs isolés :
- Dans les services à la personne et à domicile: mauvaises relations et manque de considération de la part de la personne soignée, aidée ou de son entourage : agressions physiques ou verbales ou comportements inappropriés...
- Dans les réparations, livraisons ou démarchage commercial proche de quartiers où le risque de violence est élevé ou dans un endroit éloigné de tout autre immeuble ou structure.
Ces violences d'origine externe à l'entreprise peuvent avoir des répercussions sur la santé physique ou psychique de la victime, ceci quelle que soit la gravité de l'atteinte physique. En effet, si les agressions physiques sont bien reconnues, prises en compte et traitées, en revanche, les atteintes verbales répétitives par exemple ne le sont pas toujours. Or, ces manifestations peuvent être à la longue plus graves pour les employés que certaines agressions physiques, et elles peuvent provoquer de profondes altérations psychologiques, surtout sur les femmes qui ressentent plus les effets de la violence que les hommes, et qui y sont plus exposées de part leur vulnérabilité accrue, et leur appartenance à des métiers à domicile très féminisés (infirmières, femmes de ménage...).
Les mesures préventives spécifiques aux risques du travail isolé
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La réglementation
Le Code du Travail n’édicte pas de règles spécifiques au travail isolé.
Néanmoins, plusieurs recommandations de la CNAMTS conseillent des mesures de prévention : recommandations R252 du Comité technique des industries du BTP (1986) sur les postes de travail isolés et dangereux ou essentiels pour la sécurité, recommandations R416 du Comité technique national des industries du Bois (2004) sur le travail isolé.
Le Décret du journal officiel du 20 février 1992 stipule que : « Lorsque l'opération est exécutée de nuit ou dans un lieu isolé à un moment où l'activité de l'entreprise utilisatrice est interrompue, le chef de l'entreprise concernée doit prendre les mesures nécessaires pour qu'aucun salarié ne travaille isolément en un point où il ne pourrait être secouru à bref délai en cas d'accident ».
Le travail isolé doit figurer parmi les risques listés dans le Document Unique de Sécurité de l’établissement pour la prévention et la maitrise des risques professionnels. -
Les principes généraux relatifs à la prévention des risques du travail isolé
Les principes généraux de prévention s’appliquent pleinement aux risques du travail isolé :
- la prévention primaire va chercher à dresser la liste des postes ou des situations ou le travailleur est isolé et à identifier les dangers qui peuvent survenir, de façon à éliminer ces risques en supprimant ou en diminuant le nombre et la durée des interventions en état d’isolement, en formant un travailleur spécialement avant de lui confier des tâches en travail isolé, en écartant des activités avec isolement des salariés anxieux ou dépressifs, alcooliques, ou présentant certaines pathologies (cardiaques...).
- La prévention secondaire met en œuvre, quand le risque subsiste, les dispositions visant à détecter au plus tôt la survenue d’un incident ou accident et intervenir rapidement : surveillance directe ou indirecte par des dispositifs de télécommande (DATI) ou de télésurveillance ou établissement de rondes ou disposition d'un suppléant à proximité immédiate ou en liaison avec le titulaire.
Pour les employés en déplacement, il convient qu'une personne de l’entreprise soit informée notamment sur le lieu de l'intervention, le mode de transport, l'heure de retour prévue, qu’il y ait des protocoles de communication interne qui évitent le recours au téléphone portable au volant (y compris le kit mains libres, du fait du défaut d’attention qu’il provoque).
- La prévention tertiaire vise à limiter les dommages, en évitant la survenue de complications, les séquelles en organisant et formant les équipes de secours, en reclassant les travailleurs devenus inaptes au travail isolé (cardiopathie, anxiété ...).
L'entreprise confrontée à des risques fréquents de violence externe doit prévoir une procédure d'accompagnement et de prise en charge (psychologique, juridique) des victimes, afin de limiter les conséquences psychologiques de l'agression («Débriefing», ou entretien individuel d'écoute...). -
La prévention individuelle spécifique au travailleur isolé
- La formation et l’information : repérer la limite de ses compétences face à un dysfonctionnement, informer particulièrement les intérimaires et les salariés en CDD, absence de recours à l’alcool ou aux drogues, conduite à tenir en cas d’accident ou de pathologie pour éviter son aggravation, techniques de télécommunication avec les collègues et de feedback des difficultés rencontrées, formation à la gestion des conflits et du stress destinées au personnel souvent exposé aux risques de violence (techniques de « coping », afin d'obtenir un meilleur contrôle émotionnel en situation d'agression).
- Dotation d’un moyen d’alerte : téléphone portable, dispositif d'alarme pour travailleur isolé (DATI).
- Exercer une surveillance régulière à distance ou par le passage périodique d’un rondier, mettre en place une permanence téléphonique.
- Pour les porteurs de certaines pathologies, il convient qu’ils aient sur eux une carte de l’entreprise à prévenir avec les numéros d’appel, une carte d'identification de la pathologie avec les gestes à faire d'urgence. -
La prévention médicale spécifique au travailleur isolé
Il s’agit de dépister les personnes pouvant présenter des pathologies d’apparition brusque et pouvant handicaper ou interdire au moins temporairement la poursuite de la mission : crises d’angoisse, d’épilepsie, cardiaques, diabétiques, vertigineuses ..., pour éviter que le travailleur ne soit affecté à un travail isolé.
Par ailleurs , il est préférable de n’affecter que des volontaires à un travail isolé en permanence pour éviter le plus possible l’apparition de troubles psychologiques qui pourraient se manifester chez un personne contrainte.
Les travailleurs ayant des conduites addictives (alcoolisme, toxicomanie) doivent être exclus d’un poste de travail isolé. -
Les Dispositifs d’Alarme pour Travailleur Isolé (DATI)
La mise en place d’un DATI permet de répondre à la réglementation (article R 4224-16 du code du Travail) imposant au chef d’entreprise d’assurer les premiers secours aux accidentés et blessés : en effet, le DATI est un système de télécommunication qui transmet une alarme en cas de défaillance ou d’agression du travailleur isolé vers un poste de surveillance.
La dotation d’un DATI à un travailleur isolé est une mesure préventive insuffisante si elle n’est pas accompagnée d’une permanence à l’écoute ayant une procédure rapide et compétente en cas d'alerte DATI, des consignes d’intervention efficaces (moyens, plan d’évacuation, ...).
Ces systèmes, qui permettent la détection de l'état physique du travailleur et sa localisation, sont constitués au minimum par un émetteur porté par le travailleur isolé et un récepteur placé dans l’entreprise, pour recevoir l'alarme à un poste de surveillance et la transmettre aux secours.
Il existe de nombreux modèles, allant d’un dispositif très simple (bracelet électronique) disposant uniquement d’un bouton sur le boîtier donnant l’alerte par pression à une plateforme, mais il existe aussi des dispositifs qui permettent d’échanger avec la plateforme en cas d’alerte, avec des capteurs détectant la perte de verticalité (chute du travailleur) ou de mouvement (perte de conscience du travailleur) et qui sont de plus dotés de balise GPS permettant ainsi une géo-localisation.
L’alarme peut être déclenchée volontairement, en cas de danger imminent ou d’agression, ou automatiquement en cas de malaise ou d’accident.
La présence d’une fonction de contrôle permanent de bon fonctionnement du DATI s’effectue soit de façon entièrement automatique, soit semi-automatique, avec accusé de réception manuel de l’appel de contrôle par pression d’un bouton de contrôle (sécurité supplémentaire de vigilance, ou gène selon les cas d’utilisation).
Les DATI doivent avoir une utilisation aussi simple et ergonomique que possible (grosseur de la taille des boutons de commande et largeur des espaces entre les boutons).
Les DATI doivent être protégés contre les surtensions (en particulier de la foudre), leur autonomie doit être largement suffisante pour couvrir toute la durée de la mission, le boîtier doit résister aux chocs, être étanche aux intempéries (pluie, neige, poussières).
Travaux interdits aux travailleurs isolés
Certaines activités doivent faire l’objet d’une surveillance et par conséquent ne peuvent être réalisées par un travailleur seul.
Cette surveillance doit être assurée par une personne qualifiée, instruite sur les mesures à prendre en cas d’incident et d’accident et ayant à sa disposition les moyens nécessaires pour intervenir, donner l’alerte et apporter les premiers secours.
Les principales activités (liste non exhaustive) sont :
- travail en hauteur (Code du Travail, article R4323-61)
Lorsque la protection individuelle des travailleurs est assurée au moyen d'un système d'arrêt de chute approprié ne permettant pas une chute libre de plus d'un mètre ou limitant dans les mêmes conditions les effets d'une chute de plus grande hauteur, un travailleur ne doit jamais rester seul, afin de pouvoir être secouru dans un délai compatible avec la préservation de sa santé.
- manœuvres de camions et engins (décret du 8 janvier 1965)
Lorsque le conducteur d’un camion doit exécuter une manœuvre, et notamment une manœuvre de recul, dans des conditions de visibilité insuffisante, une ou plusieurs personnes doivent, soit par la voix, soit par des signaux conventionnels, d’une part, diriger le conducteur, d’autre part, avertir les personnes survenant dans la zone où évolue le véhicule. Les mêmes précautions doivent être prises lors du déchargement d’une benne de camion.
- équipement de travail servant au levage de charge (Code du Travail, article R4323-41)
Lorsque le conducteur d'un équipement de travail servant au levage de charges non guidées ne peut observer le trajet entier de la charge ni directement ni par des dispositifs auxiliaires fournissant les informations utiles, un chef de manœuvre, en communication avec le conducteur, aidé, le cas échéant, par un ou plusieurs travailleurs placés de manière à pouvoir suivre des yeux les éléments mobiles pendant leur déplacement, dirige le conducteur.
- travaux en puits ou galerie (décret du 8 janvier 1965)
Tant qu’il y a des hommes dans une galerie souterraine ou au fonds d’un puits, un homme doit être constamment présent pour la manœuvre d’un treuil. Lorsque la profondeur du treuil dépasse 6 mètres, le service d’un treuil mû à la main doit être assuré par deux hommes au moins.
- travaux électriques effectués hors tension et sous tension (décret n°88-1056 du 14/11/1988)
Pour les installations des domaines BTB, HTA et HTB, les travaux doivent être effectués sous la direction d’un chargé de travaux, personne avertie des risques électriques et spécialement désignée à cet effet.
- travaux exposant à un risque de chute dans l’eau (arrêté du 25/07/1974)
Dans les travaux exposant au risque de chute dans l’eau, un ouvrier doit rester constamment visible d’un autre membre du personnel.
- travaux effectués sur les ascenseurs, ascenseurs de charges, escaliers mécaniques, trottoirs roulants et installations de parcage automatique de véhicule (Décret n° 95-826 du 30 juin 1995, article 8)
Pour aller plus loin
INRS : Travail isolé. Prévention des risques. Synthèse et application
Référence : ED 985, Année de publication : 2006 (Brochure de 60 pages)
Septembre 2010
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